Les beaux jours reviennent et les conditions climatiques redeviennent plus clémentes pour nos amis les reptiles.
Hibernation
Pendant l’hiver, ces animaux qui ne peuvent pas migrer à de rares exceptions (Tortues marines), vont chercher un site pouvant conserver des conditions de température relativement stables leur permettant d’éviter une congélation fatale. Ils ralentissent alors toutes leurs fonctions. Les tortues palustres comme la Cistude d’Europe (Emys orbicularis) ou la Tortue à tempes rouges (Trachemys scripta elegans) hivernent au fond de l’eau en pratiquant une respiration très réduite par voie muqueuse et cutanée. La Tortue d’Hermann (Testudo hermanni) s’enfouit dans le sol. Les lézards et les serpents vont se cacher dans des tas de bois, au fond de cavités ou sous des abris, seuls ou en groupes.
La reprise d’activité a lieu au printemps en fonction du réchauffement lié au soleil et varie en fonction de la latitude et de l’altitude. La durée des jours augmentent par rapport aux nuits et donc l’insolation si les conditions climatiques sont favorables favorise une sortie de l’hivernage plus ou moins précoce. Seuls les Lézards des murailles (Podarcis muralis) gardent une activité hivernale dans notre région en profitant des parois ensoleillées.
Lors de son réveil d’hivernage le reptile va chercher à faire remonter sa température corporelle. Le vivant se caractérise par de nombreuses réactions chimiques, et toute réaction chimique est fonction de sa température. Chaque reptile se caractérise ainsi par une Température Moyenne Préférée (TMP) qui correspond à une sorte de température idéale pour son « fonctionnement ». Cette température conditionne la qualité de sa digestion, de sa mobilité, de l’activité de son système immunitaire. En deçà le reptile rentre en léthargie, au delà il risque le coup de chaleur. Pour les tortues méditerranéennes terrestres cette TMP est de 26 à 28 °C.
Ainsi deux types de stratégies comportementales sont utilisées en sortie d’hivernage par les reptiles pour retrouver une température optimale :
⁃ s’exposer au soleil ou hélio-thermie
⁃ rechercher des surfaces chaudes ayant accumulées la chaleur du soleil ou thigmo-thermie.
Conseils pour faciliter la sortie d’hibernation
Par conséquent, pour nos tortues en captivité, il faut être très attentif à la remontée des températures en parallèle au rythme d’éclairage. Pour les tortues vivant en extérieur il faut faire attention à d’éventuelles perturbations climatiques qui dans ces moments sensibles peuvent plus facilement avoir des répercussions négatives (rhinites pour les Tortues grecques (Testudo graeca), anorexie persistante). On n’hésitera pas à rentrer préventivement les animaux en cas d’annonce de sursaut hivernal.
Pour les animaux gardés en abris (enclos fermés, cave, cave à vin ou couveuse), on reproduira une montée des températures progressives sans se précipiter, les tortues devant être remises en extérieur entre mi-mars et mi-avril.
Il sera intéressant de peser les tortues à la sortie d’hivernage. Toute diminution supérieure à 10% par rapport au poids avant hivernage ou au poids théorique ainsi que toute anorexie de plus de 3 semaines nécessite la mise en place de soins. Pour les tortues méditerranéennes type Testudo le poids théorique est donné par la formule P= 0,191 ( L)³ , où P est le poids en grammes et L la longueur en cm de la carapace mesurée depuis l’extrémité antérieure du plastron, au niveau des écailles inter-jugulaires, jusqu’à l’extrémité de l’écaille supra-caudale.
Il faudra inspecter chaque tortue afin de s’assurer de l’absence de plaie ou toute autre lésion nécessitant des soins car il faut garder à l’esprit que le système immunitaire est affaibli.
Pour limiter les risques nous vous conseillons de baigner les premiers jours vos tortues pendant 5 à 10 minutes dans une eau tiède (25 à 30°C). Ceci permettra d’hydrater facilement l’animal et de stimuler son transit. On peut envisager de mettre du sucre dans cette eau ce qui aidera à remonter leur glycémie.
Vous pouvez leur présenter de l’aliment en le mixant de telle façon que les morceaux soient plus petits que la largeur du bec de la tortue pour rendre l’absorption plus aisée.
L’anorexie post hivernage est liée à une déshydratation associée à une hypoglycémie qui se poursuit, sans intervention, en insuffisance rénale. Du fait de la diminution des défenses immunitaires à cause de l’hivernage cela peut rapidement se compliquer en problèmes oculaires, rhinites ou stomatites.
Enfin, si la reprise d’alimentation se passe bien et si vos tortues retrouvent leur activité, n’oubliez pas de les vermifuger régulièrement car elles sont facilement parasitées surtout celles vivant en jardin.
Dr. Philippe Bayol
